Dignitaires chrétiens, sages asiatiques, Indiens d’Amazonie ou philosophes occidentaux, des dizaines d’autorités morales du monde entier étaient réunies mardi à Paris pour un "sommet des consciences" sur le climat, quatre mois avant la cruciale conférence COP21 en France.
Ce rendez-vous "part du constat que la crise climatique, et plus largement la crise écologique, ne se réduit pas à ses dimensions scientifique, technologique, économique et politique" mais qu’"il s’agit d’une crise de sens", a souligné le président François Hollande en ouverture de cet événement.
Selon le chef de l’Etat, la lute contre le réchauffement climatique constitue "un choix éthique qui doit être partagé". "C’est la raison pour laquelle nous avons besoin de nous mettre au plus haut niveau de réflexion", a-t-il dit dans l’hémicycle du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Objectif: aboutir à un accord en décembre
Le climat, "why do I care" ("pourquoi je m’en préoccupe"), c’est le mot d’ordre de ce sommet auquel participent notamment l’ex-secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, le Bangladais Muhammad Yunus, pionnier du microcrédit et prix Nobel de la paix 2006, et le photographe brésilien Sebastiao Salgado. L’acteur et ancien gouverneur de Californie Arnold Schwarzenegger, coorganisateur du rassemblement à travers son réseau R20, a pour sa part transmis un message vidéo.
L’événement se tient à l’initiative de Nicolas Hulot, envoyé spécial de François Hollande pour la protection de la planète. "La crise climatique est l’ultime injustice", a martelé l’ancien animateur de télévision à la tribune, en allusion aux populations victimes des dérèglements climatiques, luttant pour l’eau ou venant grossir les flux migratoires. "Attention à ce que le fatalisme des uns ne développe pas le fanatisme des autres! Voilà ce qui se joue à Paris (avec la COP21, NDLR): c’est la paix ou le conflit. Nous allons choisir la paix", a lancé Nicolas Hulot, très applaudi.
Le Bourget, près de Paris, accueillera du 30 novembre au 11 décembre la prochaine grande conférence internationale sur le climat, qui réunira 195 pays sous l’égide des Nations unies. La communauté internationale s’est fixé pour objectif de limiter à 2°C la hausse du thermomètre global, générée par les émissions de gaz à effet de serre, faute de quoi la science promet des impacts graves et irréversibles.
"Même aujourd’hui, avec un accord qui pourrait être celui que l’on entrevoit, nous sommes encore au-dessus de 2°C, sans doute 3°C", a regretté François Hollande.
Aboutir à un accord sur le climat, c’est "renoncer à utiliser 80% des ressources d’énergies fossiles facilement accessibles dont nous disposons encore. Nous pouvons le vivre comme une contrainte, c’en est une. Mais c’est aussi une opportunité de bâtir un monde plus sûr et plus équitable", a-t-il fait valoir.
"Réflexion commune"
Un sommet d’autorités religieuses et morales n’était "pas une proposition simple dans un pays comme la France, laïque", a estimé François Hollande, tout en soulignant que "la laïcité doit permettre à tous, croyants comme non croyants, de participer à une réflexion commune".
"C’est dans cet état d’esprit que j’ai lu l’encyclique du pape François ("Laudato si’"), qui propose à tous les hommes +d’entrer en dialogue avec tout en ce qui concerne notre maison commune+", a poursuivi le chef de l’Etat. Le cardinal ghanéen Peter Turkson, président du conseil pontifical Justice et Paix et probable représentant du pape à la COP21, a lui appelé à emprunter la "route difficile" d’un "changement de trajectoire" sur le climat, un "engagement éthique" à ses yeux.
Dans la même veine, le patriarche oecuménique Bartholomée, qui exerce une primauté honorifique sur l’ensemble des orthodoxes, a souligné que "notre responsabilité est à la hauteur de l’urgence".
Les participants au sommet devaient lancer mardi en fin d’après-midi un "appel des consciences" adressé à chaque chef de délégation devant participer à la COP21.
La journée est aussi l’occasion de lancer "Green Faith in Action", une initiative mondiale visant à "rendre les villes de pèlerinage de toutes obédiences religieuses et spirituelles sobres en carbone et résilientes aux dérèglements climatiques". Sont notamment concernées la Mecque, Touba (Sénégal), Tivaouane (Sénégal), Lourdes, Fatima (Portugal), Amritsar et Benarès (Inde).
(avec AFP)