Cette prise de conscience est donc un impératif humain dans l’exercice de nos devoirs et dans la revendication de nos droits, mais elle doit aussi reposer sur la réalité (des informations primaires des sens) sociale dans ses diverses manifestations et centres d’intérêt – politique, intellectuel, sociétal, culturel, spirituel. Si les réalités sociales restent à l’état primaire des informations des sens sans aucune analyse vertueuse, la société dans son ensemble, risque de sombrer dans les profondeurs de l’animalité, car n’est-ce pas le comportement bestial que de se limiter à subir les cinq sens (V.179, S.7) ou à sombrer dans les pseudo-sciences des illuminés (V.195, S.7). La prise de conscience devient ainsi au-delà du devoir d’élévation vers ce que Allah nous destine (V.4, S.95), une nécessité collective pour éviter de retomber dans les abysses de l’inconscience (V.5, S.95) – et la séquence des deux verset montre bien que si nous ne prenons pas conscience, nous perdons donc conscience ! Et pour illustrer combien cette prise de conscience est à la fois devoir, nécessité et instrument de gestion de la cité (politique), l’Imam rappela le jugement du Prophète Sulayman lorsque les deux femmes qui se disputaient la maternité d’un bébé se présentèrent devant sa cour. Il demanda un sabre pour trancher le bébé en deux et donner à chacune une moitié – puisque leur conscience ne leur apporte pas le jugement de vérité, c’est-à-dire celle qui n’est pas sa mère se désiste de sa prétention falsifiée. Et voilà que la conscience monta encore plus haut qu’espéré dans l’argument de la vraie maman – elle refusa et accepta dans ses conditions de laisser le bébé à l’autre, l’autre qui, elle, avait validé qu’on coupe le bébé en deux ! Et de leur attitude, dictée par des consciences d’écoles antinomiques – vérité et mensonge – le prophète Suleyman dériva le jugement dicté par la bonne conscience – le rétablissement de la vérité, et le bébé fut remis à sa vraie maman.
Si les juges et magistrats dans leur délibérations, les avocats dans leur plaidoirie, les inspecteurs des finances dans leur interpellation des agents économiques, les médecins dans le soins médical, les enseignants dans l’exercice de leur métier, les Imams dans leur prêche, les ouvriers dans la tenue de leurs ateliers et machines, les étudiants dans leur quête de savoir et de capacités, les syndicats dans la défense des intérêts des travailleurs, les pères de famille dans la conduite de leur foyer, les mamans dans la gestion du ménage, les managers dans l’entreprise…,si à chacune des échelles individuelles de la société, cette prise de conscience était appliquée en tant que devoir, en tant nécessité et comme instrument d’élévation, le collectif sociale s’en retrouverait apaisé, le mal serait progressivement enterré au profit du bien et le bien tendrait vers le meilleur pour produire l’équité que Allah nous destine (V.25, S.57). Ainsi, la prise de conscience dicte avec justesse et sagesse du bon choix entre les antinomies – quand il faut agir et quand il ne faut pas agir, quand il faut parler et quand il faut juste ne rien dire, quand il faut se retirer et quand il faut s’engager…ces ambivalences que la prise de conscience favorise et qui sont arbitrés (V.24, S.8) deviennent un miroir intérieur qui reflète la réalité sociale et conduit au triomphe – comme dans le cas du prophète Sulayman – de la seule vérité.
L’Imam de mettre en garde contre les dérives idéologiques du discours de la bonne conscience, et de rappeler qu’il ne s’agit point d’un privilège intellectuel, philosophique ou même de sagesse, mais plutôt une inspiration accessible à tout adulte et qui complète son arsenal d’instruments intellectuels, philosophiques, spirituels et perceptifs au service de son humanité et de son humanisme.
Il cita dans ce sens Seydina ‘Umar, dont le discours était souvent concentré sur les dérives de l’inconscience, lui qui afficha la transparence la plus totale dans l’utilisation des ressources publiques et qui défiait les fraudeurs et leurs méthodes (lastu bi khibbin wal khibbu là yakhda’uni). C’est donc ajouta l’Imam le degré de prise de conscience individuelle et collective qui renseigne sur la valeur intrinsèque d’une nation ou d’une société, et il ne s’agit pas renchérit-il d’un acquis, il s’agit plutôt d’un équilibre et même instable comme dans le modèle quantique et qui appelle donc en permanence à des efforts d’élévation et de maintien au risque de perdre du terrain ou de basculer (Hadith…wal mukhliçûn ‘alà xatar !). Ainsi est la valeur sociale acquise au prix d’une prise de conscience collective, elle encourage les autres nations à atteindre un tel niveau de développement tout comme elle alerte de la nécessité de ne pas prétendre dormir sur ses lauriers. Et cette valeur universelle de niveau de conscience irréprochable qui fait aspirer tout individu, toute société, toute nation n’est-elle pas seulement la primo nature qui condense la légitimité du bien dans toutes ses composantes et décrète l’interdiction du mal dans toutes ses dimensions (V.157, S.7) ?
Et on chercherait à résumer ces valeurs de noblesse qu’on reviendrait sur le juste milieu, pur produit de la tradition prophétique (Hadith – le meilleur en tout est le plus au milieu !) qui en gardien de l’équilibre, de l’équité et de la justice assure une équidistance des composantes de la société à la sphère des droits et devoirs. Valeur de juste milieu immensément élevée pourtant et que Allah révèle dans le statut de la communauté privilégiée du Prophète (V.143, S.2), comme l’étalon des nations, mais bien sûr, ce statut que le prophète a acquis pour nous (Lam yamtahinnà…Imam Busary dans le Burd) n’est pas une fin en soi, sinon nous serions au paradis céleste, mais une invite à l’exercice permanent de la prise de conscience. Prise de conscience par la culture du juste, de la vérité, de la convenance, exactement comme faisait le Prophète, et dans cette culture, le Prophète nous dit d’abandonner tout ce qui n’a pas de sens pour notre vie (tarkuhû mà là ya’nîh)…pensez-y, laisser tomber tout ce qui n’a aucun sens et vous verrez quelle hauteur vous prendrez !
Prenons conscience pour prendre hauteur, ne serait-ce que pour rendre hommage à Cheikh Al Hadj ‘Abdul Aziz At-Tijâny, qui nous a quitté il y a maintenant 16 ans, lui qui par son niveau élevé de prise de conscience était devenu la conscience populaire de son époque, au point de nous sauver l’année dernière de ceux qui n’avaient aucune conscience de la réalité de la fin de leur mandat politique et de rappeler aux nouveaux élus la valeur sacerdotale de leur mandat électif.
Merci aux soeurs et frères d’Europe (Gent, Salu, Brescia, Stockholm, Genève, et ailleurs) qui célèbrent le souvenir de cette conscience permanente de Mam Abdu en nous.
Vous pouvez écouter ci-dessous le Xutb et admirer déjà les belles images de Makkah en plein travaux de développement, même la Ka’ba ne se satisfait pas de son statut de noblesse et de majesté acquise à jamais, elle se modernise !