En revanche, il y a un mythe qui s’est longtemps développé dans la conscience collective sénégalaise, c’est celui du Sénégalais naturellement non violent. Or ce mythe s’est complètement effondré
dans les dernières années au pouvoir du Président Wade, quand les jeunes sont allés manifester devant les grilles du palais présidentiel ; des jeunes qui parfois s’auto immolaient. Un jeune qui peut faire cela, un jour il peut porter une ceinture, égorger, poignarder ou immoler froidement son prochain.
Ce sont des situations de désespoir qui mènent souvent aux actes les plus irrationnels et souvent insoupçonnés. De plus, les récentes échauffourées du mois de mars 2021 au Sénégal déclenchées par la tentative par l’État de liquider des
adversaires politiques, en est une parfaite illustration.
La déviance sociétale monte exponentiellement d’un cran et se manifeste par la transgression accrue des normes sociales en vigueur, inquiétante qu’elle est, la remise en question du système éducatif, de la gouvernance qualifiée de gabégique depuis 1960 restent de véritables problématiques. On peut mettre en évidence plusieurs zones d’incertitude aujourd’hui qui mettent en cause la parfaite quiétude de l’espace sociale jadis connue du Sénégal.
Qu’en est-il des véritables facteurs de ce phénomène ?
La précarité fulgurante pourrait être une source de violence et de criminalité.
Le Sénégal et l’Afrique en général est confronté à la pauvreté, au chômage et à l’exclusion sociale. Un triptyque qui pourrait déterminer cette précarité des jeunes qui est un facteur de
radicalisation, de violence et de criminalité dans toutes ses acceptions. Cette jeunesse désœuvrée, souvent en conflit avec l’État, qui est souvent caractérisé par sa gestion nébuleuse des affaires publiques, s’ouvre à toutes les tentations, à tous les maux.
A cela s’ajoute, la violence découle – en dépit de la dimension sociologique – d’une dimension socioéconomique qui se traduit par la frustration de la jeunesse. Ainsi, les États africains qui s’engouffrent dans la mal gouvernance constituent les facteurs principaux de violence et de deviance chez certains jeunes qui sont dans le champ magnétique des mouvements criminels, qui concourent à énormément s’investir pour attirer plus de jeunes qui vont s’engager pour la défense de leur idéologie.
En outre, lorsqu’il y a faillite de l’Etat quant à la mise en œuvre des politiques sécuritaires, la peur s’installe au niveau de la population. En ce sens, il urge d’interpeller l’autorité politique sur cette question stratégique et l’inviter à remettre en question, in extenso, son "pouvoir infrastructurel". Le constat est général, les politiques, en ce contexte d’élection, se mettent plutôt activement dans la dynamique de capter des voix pour remporter les sièges afin de modifier l’allocation des postes politiques au sein de l’assemblée nationale. Les priorités sont oubliées, alors que de la politique politicienne. Ce type de pathologie n’est pas bonne pour une nation. C’est des logiques pernicieuses et insidieuses qui à la longue peuvent entraîner une déflagration soudaine et brutale de nos institutions.
Dans une autre dimension, nous choisissons la religion comme source de pacification de l’espace politico-social, qui pourrait être un mécanisme important de résolution des conflits.
Ainsi, la religion musulmane et celle chrétienne devraient travailler à l’établissement de véritables règles de base permettant la réorganisation de la société.
L’islam et le Soufisme devraient jouer pleinement leur rôle. Véritable école de construction de soi, le soufisme, doctrine majoritaire au Sénégal qui se manifeste à travers les confréries a su puiser dans l’immense richesse doctrinale de la mystique musulmane les éléments les plus conformes au génie négro-africain : la notion de mahaba (amour) qui se focalise sur la personne du Prophète et qui est une modalité qui insiste plus sur le développement de l’affect que celui de l’intellect. Souleymane Bachir DIAGNE, dans une interview définie le soufisme comme étant « la dimension intérieure de l’islam, c’est un islam qui, au-delà du rituel qui le définit, au-delà des règles qui sont les tiennes, au-delà des piliers, qui en constituent la définition, est une certaine inquiétude de Dieu, c’est donc une manifestation permanente de l’inquiétude de Dieu. »
Ce que l’actualité nous montre du soufisme comme phénomène prédominant au Sénégal, n’est qu’un
épisode d’une très longue histoire. Cette épaisseur historique du soufisme
sénégalais est un point de référence important pour qui veut comprendre la situation de ce pays dans la période
contemporaine.
In fine, Il ya beaucoup de mécanismes qui pourraient apporter la solution aux violences résiduelles telles que vécues au Sénégal. Il urge de se retrouver autour d’une table, dans le cadre d’assises, in fieri,
afin de répondre à ce phénomène qui continu d’inquiéter, dans un émoi à son comble, et d’installer un sentiment d’insécurité au niveau de la population, qui risquerait de replonger le peuple dans l’Etat de nature de Hobbes, dans lequel régnait la justice populaire.
Gorgui Malick NIANG, Journaliste Doctorant en Science Politique et Relations Internationales