Chaque fois que j’entends son fils Doudou Keinde Mbaye élever la voix, le souvenir de son père me revient avec une nostalgie prenante. La génération qui a pris le relais ne fait point nature morte. Il suffit d’écouter Abdoul Aziz Mbaye, Daou Gor, Mansour et même leurs enfants pour s’en rendre compte. Ce sont ces chanteurs qui ont fait connaître les écrits de tous les érudits de Tivaouane en commençant par ceux de Cheikh Seydi Hadj Malick Sy, l’un des chantres du Prophète Mouhammad PSL les plus prolixes du continent africain.
Mbaye Dondé était le chanteur attitré de Serigne Babacar Sy, son guide et son maître à penser. Quand il chantait, sa voix de stentor s’élevait comme un vol d’oiseaux vers le ciel et ne revenait sur terre qu’après avoir séduit les occupants des espaces célestes. Il n’était pas seulement un interprète doué mais, également, un poète inspiré dont les compositions en langue wolof étaient remplies de mysticisme. Il avait su composer et interpréter un chant se rapportant au voyage nocturne du Prophète Mouhammad PSL. Cette chanson restera l’une de ses plus belles compositions sinon la plus belle tant elle est revigorante, pleine d’émotion et de tendresse. Dans un pays où le taux d’analphabétisme en langue arabe est trop élevé, Mbaye Dondé avait su trouver la meilleure parade grâce à son intelligence, pour nous faire comprendre le langage des maîtres de l’islam des lettrés.
Quand Mbaye Dondé chantait, c’était tout son être qui vibrait à l’unisson. Ses nerfs se gonflaient et son teint devenait plus noir à cause des paroles qui sortaient de sa bouche avec une fréquence et un rythme métronomiques. La sueur qui dégoulinait de son front, rendait son visage étincelant, telle une peau couverte de poudre dorée. Son intelligence, sa vaste culture islamique, sa finesse d’esprit et sa mémoire phénoménale en plus de sa voix conquérante, attestaient qu’on pouvait l’imiter, mais jamais l’égaler. Il fait partie intégrante de ceux qui font la fierté de l’école de Tivaouane allumée par l’incomparable Mawdo Malick Sy, serviteur sans commune mesure, de l’islam et de la confrérie fondée par Aboul Abass Ahmada Tijane RTA.
Me rendant un jour aux cimetières de Tivaouane, j’ai effectué un long arrêt devant le mausolée de Mbaye Dondé, priant pour le repos de son âme. Nous lui devons ces prières car, il fait partie de ceux qui nous ont fait aimer les chants Tidiane. Je me devais de lui consacrer cette chronique en hommage à son vécu religieux et à sa voix pleine de grâce et de sainteté.
Majib Sène
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