23 novembre 2024
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Les Chroniques du Doyen – Serigne Abdoul Aziz Sy al amine, la sagesse et la droiture (par Majib Sène)

S’il m’était permis de décerner le prix Nobel de la sagesse, de la vérité, de l’intelligence et de la soumission totale à dieu, je choisirais sans sourciller, Serigne Abdoul Aziz Sy Al Amine, le distingué secrétaire particulier de son vénéré père, Khalifa Ababacar Sy. Formé par cet homme de dieu aux élans féconds, il a vécu dans l’honneur et le respect absolu des valeurs qui fondent le socle de l’école de cheikh Seydi Hadj Malick Sy RTA, il a rempli sans défaillance aucune, toutes les missions découlant des magistères de ses pères, de ses frères et de lui-même. Sur tous les plans religieux, culturels, économiques et familiaux, al amine a impressionné son monde par sa constance, par son dynamisme, par son dévouement et par son souci de ne jamais déroger à aucune règle de bonne conduite. Il fut un guide religieux d’une envergure exceptionnelle parce que imbu des valeurs et vertus de l’islam confrérique, dont l’un des plus grands chantres sinon le plus distingué, est incontestablement Mawdo Malick, géniteur incomparable de « Xilazou Zahab » et autres œuvres panégyriques pour l’honneur et la gloire du Prophète Mouhammad PSL. Pour avoir tant soit peu côtoyé cet homme de dieu à la posture magnanime, j’ai cherché sans le savoir, les sources abondantes de son dynamisme, de sa générosité discrète, de son éloquence coulante comme les eaux du Nil, de sa connaissance approfondie de la société sénégalaise et de sa façon de tisser des relations humaines qui résistent aux vicissitudes de la vie. Durant sa vie, Serigne Abdou a parcouru le Sénégal de long en large, créant partout des dahiras rien que pour renforcer l’audience et la crédibilité de la tarikha fondée par Aboul Abass Ahmada Tijane RTA. Son comportement au figuré, s’apparente à celui d’un père de famille veillant sur sa fratrie en l’installant sur la droiture, la solidarité et le partage. Malgré son ouverture d’esprit et sa grande sociabilité, il était prompt à réprimander le mensonge et à rétablir la vérité en toute chose et en toute circonstance. On a beau le côtoyé, apprécié son urbanité exquise mais on se gardera de lui marcher sur les pieds. Il a consacré toute sa vie à défendre et à pérenniser les acquis de la confrérie Tijane dont le fief sûr, profond et inaltérable est Tivaouane la ville de lumière.

Il m’a été donné le privilège de partager plusieurs fois ses repas avec lui dans ses appartements en présence de son fils Serigne Moustapha dont je salue la courtoisie, le savoir faire et le savoir vivre. Son apport personnel dans l’élargissement des bases de la tarikha s’apparente à celui de son valeureux père qui est parti, emportant dans sa demeure éternelle, beaucoup de secrets que son père lui confiait. Il est impossible de parier de Tivaouane sans se référer à Al Amine qui était le point de convergence de tout ce qui concerne la confrérie. Dès son jeune âge, son père l’avait initié dans la gestion de toutes les questions relatives à l’évolution de la tarikha au point qu’il en était devenu l’un des plus illustres contrôleurs.

Grand communicateur et régulateur social de renom, il était sollicité partout pour régler des conflits ou remettre de l’ordre dans les dahiras en proie à des dissensions. Porte parole de tous les khalifs généraux de la confrérie, il avait cette rare capacité de s’acquitter de ses nombreuses tâches en temps et en heure réels sans jamais déceler la moindre fatigue. Dans nos conversations, je lui disais qu’il était par excellence l’historien de la famille de Mawdo Malick tant il était instruit en profondeur de tous les événements heureux ou malheureux qui ont ponctué l’évolution de la communauté. Être régulier dans ses devoirs religieux, se mettre à la disposition de tous sans maugréer, faire respecter et appliquer les enseignements de son père et être le miroir de la tidianya, tel était Al Amine. Sa particularité était de ne rien faire ou entreprendre à moitié car l’homme était entier, sans réserve ni compromission. C’est ainsi qu’il a été formé dans la pure tradition des êtres véridiques, civilisés et dignes de confiance. Il était la synthèse de toutes les belles traditions de la famille Sy grâce à la parfaite éducation qu’il a reçu de son père.

Célébrant le quarantième anniversaire du rappel à Dieu de son vénéré père Khalifa Ababacar SY, il m’avait fait l’honneur de présider le comité national préparatoire. Son engagement personnel dans cet événement d’une portée historique, avait été à la base de tous les succès qui ont jalonné notre cheminement. Quelques temps avant son rappel à Dieu, nous avions eu des séances de travail étalées sur une semaine à Tivaouane, avec le professeur Mamadou Koumé et en présence de son fils Serigne Moustapha et son neveu Babacar Fall. Sous le feu roulant de nos questions, il nous avait parlé de long en large de la vie et de l’œuvre de Serigne Babacar Sy RTA. Malgré la fatigue et le poids de l’âge, il n’avait rien perdu de sa superbe, de son éloquence et du bon fonctionnement de sa mémoire. Quand il parlait de son père, son inspiration s’accentuait de plus belle et à travers ses propos, se révélaient ses profonds sentiments d’affection et de respect à l’endroit de celui qui fut l’inventeur des dahiras au Sénégal en 1927.

Après sept mois de califat, il rendit l’âme le 22 septembre 2017 à l’âge de 90 ans. Son ancrage dans les valeurs de l’islam soufi en avait fait un homme foncièrement pieux, généreux, solidaire et compatissant. Il restera éternellement gravé dans nos mémoires collectives pour avoir consacré toute sa vie à l’islam, à la confrérie Tidiane, à la famille de son grand père cheikh Seydi Hadj Malick Sy et à tous les disciples de la merveilleuse école de Tivaouane.

Serigne Abdou Al Amine avait le sens très poussé du partage. En effet, il distribuait intégralement dons et aides qu’il recevait, dans la majorité des familles installées à Tivaouane et même jusqu’au-delà. Il n’avait de répit que lorsqu’il venait en aide à tous ceux que le hasard mettait sur sa route. Son humanisme de bon aloi, son intégrité, son sens de la mesure et sa compréhension du monde, ont fait de lui un guide religieux incorruptible, équilibré toujours en phase avec les principes sacro-saints de l’islam et du tidianisme. Il fut un homme indemne de toutes souillures durant sa jeunesse, durant son adolescence et durant sa vieillesse. En vérité, il fut un homme exemplaire dans toute l’acception du terme.

Qu’il repose dans les plus splendides jardins d’Allah SWT.

Amine

Majib Sène

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